Marina Abramovitch
Écouter l’autre, prêter l’oreille et le coeur, poser des questions. Le podcast est un exercice de paroles et de conversations. Nous découvrons l’autre par sa voix, et sa voie par les mots (une blague qui ne marche qu’à l’écrit). Le podcast fait appel à l’ouïe. Le livre, à la vue et au temps long. Celui de la lecture.
Dans cette première revue de lecture, je me réjouis de vous présenter l’autobiographie de l’immense Marina Abramovic, Traverser les murs : Mémoires (publiée en 2016).
Marina Abramovic, artiste serbe, de performance, née en 1946 à Belgrade.
Marina Abramovic, c’était d’abord dans mon esprit un visage. Le dessin de son nez et de sa bouche. Ce grand front et sa pose altière. Je ne connaissais pas son nom. Je n’avais aucune idée de ce qu’elle faisait. Je me souviens de l’avoir entre-aperçu dans les pages de mon livre de français au lycée. En 2017, je me procure Traverser les murs. Le titre m’appelle. Le portrait de Marina Abramovic en couverture aussi.
Drôle, saisissant, bouleversant. Une claque. Je découvre un parcours de vie fascinant. La performance comme un art. Je plonge dans un univers nouveau. Une philosophie de vie, les réflexions qui créent les performances, les histoires abracadabrantes qui en découlent parfois.
Je rencontre une femme déterminée, humaine, inspirée et inspirante. Un must.
Ces citations qui m’ont marquées :
Il peut m’arriver de me mettre en colère, moi aussi, mais il en faut beaucoup pour que je me mettre à crier de rage. Ca mobilise une énergie incroyable. Bien sûr, il m’arrive de hurler dans mes performances – ce n’est qu’une manière d’exorciser les démons. Mais je ne hurle pas contre quelqu’un.
J’en suis venue à croire à l’idée de réalités parallèles. Je pense que la réalité que nous voyons en ce moment représente une fréquence précise et comme nous sommes tous branchés sur la même fréquence, nous pouvons nous voir. Mais il est possible de changer de fréquence. D’entrer dans une réalité différente. Et je crois qu’il existe plusieurs centaines de ces réalités.
il y a des gens qui ont la faculté – et l’énergie – non seulement de créer une oeuvre, mais de faire en sorte qu’elle soit présentée exactement au bon endroit, au bon moment. Certains artistes se rendent compte qu’ils sont obligés de consacrer autant de temps que celui qu’ils ont mis à avoir une idée pour réussir à la présenter et à mettre en place l’infrastructure de soutien nécessaire.
A l’époque, je n’imaginais pas pouvoir gagner ma vie avec mes performances. J’avais des idées, c’est tout, et j’avais l’impression qu’il fallait que je les réalise, coûte que coûte.
Les êtres humains ont peur de choses très simples – nous avons peur de la souffrance, nous avons peur de la mort. Ce que je faisais dans Rhythm 0 – comme dans toutes mes autres performances -, c’était mettre en scène ces peurs, pour le public : exploiter son énergie pour pousser mon corps aussi loin que possible. Ce faisant, je m’affranchissais de ces peurs. Et lorsque cela se produisait, je devenais un miroir pour les spectateurs – si je pouvais le faire, ils pouvaient le faire aussi.
Il (le dalai-lama) a affirmé qu’il est possible de dire les vérités les plus terribles à condition de commencer par ouvrir le coeur de l’humain par l’humour. Autrement, le coeur se ferme et rien ne peut y entrer. Le simple fait d’être en sa présence était une expérience de toute beauté.
Vous devez rêver pour faire face à vous-même.
C’est une chose qu’il faut savoir à mon sujet : je méprise le suicide. J’estime que c’est la pire façon de quitter la vie. Je crois passionnément que, si on possède le don de créer, on n’a pas le droit de se tuer parce qu’il est devoir devoir de partager ce don avec autrui.
J’avais très souvent intégré la mort dans mon oeuvre, et j’avais lu beaucoup de choses à ce sujet. Il me parait essentiel de faire place à la mort dans sa vie, de penser à la mort chaque jour. On a grand tort de se croire éternel. nous devons comprendre que la mort peut survenir à tout moment, et il est essentiel d’être prêt.